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​Comment la sensibilisation via la prévention dans les écoles peut-elle diminuer les inégalités de genre et les violences sexistes?

Si l'éducation nationale joue un rôle essentiel dans la promotion de l'égalité F/G, elle doit pouvoir s'appuyer sur un réseau d'association spécialisées.

La littérature démontre que le choix d'orientation scolaire et ensuite professionnelle est largement influencé dès le plus jeune âge. Les valeurs véhiculées dans notre société et en particulier les stéréotypes de genre vont fortement impacter les comportements et les choix des individus. Un enfant, selon les représentations qu'il se fait d'un métier ou d'une profession, et de l'image qu'on lui renvoie de ses capacités, fera des choix différents en fonction de son sexe. L'effet Pygmalion, « prophétie autoréalisatrice » qui entraine une amélioration des performances d'un sujet, en fonction du degré de croyance en sa réussite venant d'une autorité ou de son environnement » n'est de fait pas sans conséquence sur les élèves. Il renvoie à l'idée que nos croyances peuvent influencer les actes et les perceptions des autres, tant elles vont changer finalement nos propres comportements. De nombreuses études montrent les effets du regard que peuvent porter les enseignants sur leurs élèves en milieu scolaire, notamment sur les choix d'orientation (Gleyse, 2015)[1]. Ainsi, même si les représentations se forgent chez l'enfant par l'ensemble de ses interactions (famille, amis etc.), la place de l'école reste primordiale. Les professeur.es occupent un rôle essentiel dans la construction des représentations scolaires et professionnelles des enfants. Le milieu social d'origine, comme le sexe, va largement influencer les trajectoires (Bourdieu, 1964)[2]. En effet, selon la manière dont un enseignant présentera sa matière, l'image de la place des femmes et des hommes dans notre société et des rapports sociaux qu'ils entretiennent, peut s'en voir biaisée. Ceci nous éclaire particulièrement sur la différenciation genrée des orientations scolaires où « après le baccalauréat, dans les classes préparatoires aux grandes écoles, 74 % des élèves des filières littéraires sont des filles, pour 30 % des élèves de filières scientifiques » (« Égalité entre les filles et les garçons », 2019)[3]. Nous faisons ainsi le constat d'une forte ségrégation éducative, qui s'accompagne d'une hiérarchisation entre les femmes et les hommes, avec une dévalorisation certaine de la place des femmes dans notre société et son histoire, tout comme l'ensemble des activités dites féminines.

Face à cela, il apparaît indispensable d'élargir le champ des possibles pour jeunes, de déconstruire les stéréotypes sexistes, qui enferment les filles dans des rôles de soumission et les garçons dans des injonctions virilistes.

Ainsi, l'éducation nationale joue un rôle essentiel dans la promotion de l'égalité entre les filles et les garçons. Pour cela, elle doit poursuivre, voir renforcer, la formation de ses enseignants, se doter d'ouvrages non sexistes et favoriser une pédagogie au service de l'égalité. Mais elle doit pouvoir également s'appuyer sur des acteurs extérieurs pour renforcer son action dans le champ de la lutte contre les inégalités de genre, terreau des violences.

Ainsi, de nombreuses associations spécialisées interviennent au sein des classes sur différents thèmes tels que les violences, la prostitution, l'homophobie, le racisme, le sexisme ou encore les relations affectives et amoureuses. En apportant des informations juridiques, des pistes de réflexions et en éclairant sur les processus en jeu dans les violences sexistes et la perpétuation des stéréotypes sexistes, les actions de sensibilisation poussent les individus à s'interroger sur leur propre comportement et ceux des personnes qui les entourent. Ces actions de prévention participent à la déconstruction des rapports de domination qui légitiment aujourd'hui les violences dans notre société. Susciter l'intérêt des élèves et des professeur.es sur les questions de genre, de discrimination et de violences, revient à permettre d'élargir leur spectre de représentations à ce sujet.

Le CIDFF 92 Nord, association agréée par l'Education nationale, anime des actions de prévention depuis plus de 15 ans, sur la thématique du sexisme et des violences sexistes ou sexuelles mais également sur les orientations genrées grâce à une action intitulée « les métiers n'ont pas de sexe ». Le CIDFF intervient directement dans les établissements scolaires ainsi que dans les quartiers prioritaires en partenariat avec les associations de quartiers.

Ainsi, l'association entend participer à la déconstruction de ce type de stéréotypes, à la prévention des comportements et violences sexistes, susciter une réflexion sur les représentations genrées enfermant aujourd'hui les individus dans des rôles limitant leurs choix de vie, en informant les jeunes sur leurs droits particulièrement en matière de droits à disposer de son corps et enfin en favorisant les échanges et les argumentations pour développer l'esprit critique. Le CIDFF propose ainsi aux jeunes un espace de parole sécure et encadré, leur permettant de s'interroger sur la place qu'ils occupent dans la société, l'effet des stéréotypes de genre et enfin de questionner sur le système patriarcal.

Les actions sont adaptées à chaque tranche d'âge et pensée en lien avec les programmes d'histoire-géographie, d'éducation civique et de SVT :

6ème : égalité, sexisme et stéréotypes

5ème : relation affective et amoureuse

4ème : sexualités et droit à disposer de son corps (qui pourrait être coordonné avec les professeurs de SVT)

3ème : Prévention des violences sexistes et sexuelles - prostitution

Avec la prise de conscience de l'ampleur des violences sexistes et sexuelles, notamment depuis le #metoo, les actions de prévention dès le plus jeune âge sont indispensables pour un meilleur repérage des situations de violences. L'intervention d'associations comme le CIDFF 92 NORD, dans la lutte contre les inégalités de genre auprès des jeunes prend tout son sens aujourd'hui.

Pour autant, afin d'être réellement efficace, ces associations ont réellement besoin de moyens financiers. Nous attendons en ce sens une politique publique ambitieuse sur les violences sexistes et sexuelles, encore aujourd'hui sources de souffrances et de traumatismes graves.


[1] Gleyse, J. (2015). L'égalité Filles-Garçons dans l'enseignement en France. Psychanalyse, 71-95

[2] Bourdieu, « Les Héritiers », 1964

[3] Couppié, T. & Epiphane, D. (2019). Et les femmes devinrent plus diplômées que les hommes. Céreq Bref, N°373, 1-4

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